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RELANCER UNE ENTREPRISE

Reprise de l’interview de Mme Mihoub Wafa paru pour la première fois sur LA VIE ÉCO

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« Un taux de 10% est relativement normal dans une SSII ».

Un taux de turn-over élevé est un facteur de dysfonctionnement. Le turn-over dépend des conditions de travail, de la situation du marché de l’emploi et de la gestion de la carrière. Il peut être une preuve de vitalité du marché du secteur concerné.

Constatez-vous une recrudescence du turn-over au sein des entreprises ?
Le turn-over est effectivement un phénomène de plus en plus présent dans la vie des entreprises. Il s’agit du renouvellement des effectifs suite aux départs (rupture de contrats normaux, licenciements, démission…).
Le taux devrait se situer dans des moyennes variant de 5 à 15% en fonction des secteurs. Son interprétation est donc relative. En effet, avoir un taux de 10% dans une SSII est relativement « normal » alors qu’il sera considéré comme trop élevé, voire alarmant, dans un organisme public par exemple.
De manière globale, un taux de turn-over élevé est considéré comme un facteur de dysfonctionnement et de coût pour l’entreprise. Il fait baisser sa productivité, générant des arrêts ou retards dans les projets, une mauvaise qualité de service, une baisse des ventes, une perte éventuelle de clients, le remplacement des effectifs avec des coûts de recrutement, de formation et d’apprentissage. Le capital humain et intellectuel de l’organisation est diminué.
Inversement, un turn-over faible est signe d’un climat social positif et de bonnes conditions de travail.
Pour bien lutter contre le turn-over, il convient donc de l’interpréter sur la durée et dans un premier temps, en tenant compte du secteur d’activité, de la catégorie professionnelle, des fonctions touchées, sexe, tranche d’âge, la situation du marché de l’emploi… qui peuvent fournir des explications.

 

Comment l’expliquez-vous ?
Les raisons d’un turn-over élevé sont nombreuses et sont issues généralement de trois types de raisons : les conditions de travail, les évolutions de carrière et le marché de l’emploi.
Cela montre que l’entreprise a du mal à fidéliser ses salariés et qu’ils sont prêts à quitter l’entreprise dès qu’une opportunité se présente.
Le taux de turn-over élevé peut révéler un certain degré d’inquiétude, voire d’insatisfaction parmi les salariés de l’entreprise ou, s’il est élevé pour une catégorie du personnel, des difficultés au travail (pénibilité ou démotivation par exemple) pour cette catégorie plus spécifiquement.
Il résulte souvent de mauvaises conditions de travail, d’un climat social détérioré, du stress au travail, d’une mauvaise gestion des ressources humaines, des mauvaises relations avec le management, d’une mauvaise gestion des carrières, d’une absence de perspectives de carrière, des promesses non tenues en termes d’augmentations salariales ou d’octroi de primes. Tout cela peut expliquer la démotivation et la recherche d’un autre emploi.
Lorsque le secteur devient porteur et concurrentiel, les meilleurs partent parce qu’ils sont attirés par d’autres concurrents prêts à payer plus ou à offrir plus de responsabilités. En effet, ce n’est pas le salaire qui arrive en première position parmi les raisons de départ. Beaucoup d’enquêtes, tant au Maroc qu’ailleurs, le montrent. Les salariés cherchent d’une manière générale et de plus en plus, une bonne ambiance au travail, de bonnes relations (écoute, échanges, respect, exemplarité, …) avec leurs managers, un bon équilibre professionnel et personnel, un plan de carrière relativement clair et accompagné de formations, un aménagement du temps de travail… Bien entendu le salaire et les primes viennent en bonne position, mais ne constituent pas la principale raison.
D’autres phénomènes peuvent expliquer une hausse du turn-over. Les aspirations des salariés en matière de travail ont considérablement évolué. Plus opportunistes, ils ne sont plus à la recherche d’un « emploi à vie » et pratiquent le « zapping professionnel » en changeant tous les 2 à 3 ans d’entreprise pour évoluer rapidement en termes de salaire ou de carrière. Cela est courant chez les jeunes salariés et chez bon nombre de cadres des grandes entreprises marocaines et des PME. Les secteurs les plus touchés sont généralement le commerce, les entreprises technologiques, les centres d’appels…

 

Pourtant, comme vous l’avez expliqué précédemment, il peut être également une opportunité…

Effectivement, l’entreprise peut vivre le turn-over comme une opportunité pour se renouveler. En effet, un taux très bas de turn-over signifie un effectif stagnant, peut-être vieillissant qui freine les possibilités de mobilité interne et donc l’évolution de carrière. Cela limite aussi les recrutements externes qui peuvent dynamiser l’entreprise par l’apport de sang neuf.

En outre, le turn-over lié à la situation du marché du travail peut aussi être un signe de vitalité du secteur. Par exemple, le secteur IT est en plein boom au Maroc, avec d’excellentes perspectives d’évolution sur les prochaines années. C’est donc l’occasion attendue pour les informaticiens de changer d’emploi (salaires, carrière). Le secteur connaît donc un fort turn-over qui est ici un signe de bonne santé, malgré le fait désolant pour beaucoup d’entreprises qui subissent de plein fouet des départs massifs et se trouvent obligées de procéder à de fortes augmentations pour garder leurs talents. Il y en a même qui quittent pour des augmentations très faibles.

 

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